Aperçu de la Banque du Canada de décembre : Face, on ralentit maintenant. Pile, on ralentit bientôt.

5 décembre 2022 - 6 minutes
Drapeau canadien claquant au vent devant l’immeuble d’une société
Nous prévoyons une hausse de taux de 25 points de base (pdb) à la réunion de décembre de la Banque du Canada (BdC), et une déclaration laissant présager d’autres hausses de taux. Cela dit, l’annonce semble exceptionnellement incertaine. Voilà une conclusion digne de l’année pleine de surprises que nous avons connue. La BdC a adopté une stratégie de communication plus équilibrée au cours du dernier mois, ce qui contraste fortement avec les fanfaronnades de lutte contre l’inflation de l’été et du début de l’automne. Le gouverneur Macklem a reconnu que la BdC approche de la fin de son cycle de resserrement, ce qui implique un éventuel ralentissement des hausses au cours des prochaines réunions. Pour le marché, les probabilités d’un scénario ou d’un autre ressemblent à celles d’un tirage au sort, et la communauté des analystes est divisée : il ne serait pas surprenant de constater une hausse de 25 ou de 50 pdb. Nous examinons les arguments pour les deux scénarios.

Arguments soutenant une hausse de 25 pdb

  • Un resserrement important est déjà en place dans le système. Selon nous, la sensibilité à la dette est le facteur le plus important qui sous-tend les perspectives de croissance, surtout compte tenu de la possibilité que la politique monétaire ne soit pas transmise de façon linéaire. Nous pensons qu’il serait préférable de procéder de façon plus prudente à l’avenir.
  • L’indice des prix à la consommation (IPC) excluant l’alimentation et l’énergie montre des signes de ralentissement. La mesure excluant l’alimentation et l’énergie désaisonnalisée s’établit à +0,2 % d’un mois à l’autre en octobre, il s’agit de la croissance la plus lente depuis novembre 2021 et la tendance sur trois mois est à son plus bas niveau depuis janvier 2022. De même, les mesures des prix des intrants, des coûts d’expédition et des prix de production prévus montrent toutes des signes de ralentissement.
  • Les mesures de relance budgétaire ne feront pas obstacle. Nous ne nous attendons pas à ce que le gouvernement fédéral nuise à la BdC en 2023. La mise à jour budgétaire de 2022 ne comprenait que des augmentations mineures des dépenses et était plutôt axée sur l’amélioration de la situation des finances fédérales.
  • La BdC cherche un équilibre. Des commentaires récents de la BdC laissent entrevoir une certaine appréhension quant au rythme du resserrement. Le gouverneur Macklem a ouvert la porte au ralentissement du resserrement après l’annonce d’octobre de la BdC et a reconnu que l’organisation approchait de la fin de son cycle de resserrement.

Arguments soutenant une hausse de 50 pdb

  • L’inflation de base demeure trop élevée. Bien que la BdC soit sans aucun doute soulagée de voir que l’inflation globale a probablement atteint un sommet, les mesures de l’inflation de base demeurent à un niveau inquiétant. La médiane pondérée et la moyenne tronquée ont toutes deux augmenté de 0,1 point de pourcentage (pp) en octobre, pour s’établir respectivement à 4,8 % et à 5,3 % sur 12 mois.
  • Moins de capacité excédentaire dans le système que prévu. Le rapport sur l’emploi d’octobre indique un point de départ plus robuste pour le marché du travail, ce qui peut indiquer qu’il faudra plus de temps pour constater une capacité excédentaire sur le marché du travail. De même, les révisions à la hausse du PIB de 2020 à 2022 et la hausse surprenante de 1,4 pp du PIB réel au troisième trimestre appuient également le scénario de point de départ avec moins de capacité excédentaire.
  • Les pressions salariales n’ont pas encore diminué. La croissance des salaires des employés permanents a été stable au cours des six derniers mois, à environ 5,5 %, ce qui témoigne encore une fois du resserrement du marché du travail et représente un risque à la hausse pour les pressions inflationnistes futures.
  • Tendances mondiales des banques centrales. La Banque centrale européenne (BCE), la Banque d’Angleterre (BoE), la Réserve fédérale américaine (Fed) et la Banque de réserve de la Nouvelle-Zélande (RBNZ) ont toutes relevé leurs taux de 75 pdb lors de leurs dernières réunions et devraient toutes les augmenter d’au moins 50 pdb la prochaine fois. Bien que la BdC soit évidemment plus sensible à l’évolution de la situation au pays qu’aux tendances internationales, la voie de la moindre résistance consiste souvent à suivre la tendance mondiale.
Nous estimons que les deux ensembles d’arguments sont valables, mais en fin de compte, nous croyons qu’un ralentissement du resserrement est logique. Si le Canada se trouve en fait entre 50 et 75 pdb du taux final, la BdC peut se permettre de revenir à une approche plus précise en matière de politique monétaire afin d’éviter un dépassement. S’il s’avère qu’un taux final de 4,75 % ou de 5,00 % est plus approprié, la BdC peut poursuivre la hausse en relevant le taux de 25 pdb au deuxième trimestre. Déterminer le taux final réel devient maintenant plus important que le parcours pris pour l’atteindre.

Stratégie de change

Novembre a été un mois marquant. Nous misions au début sur le rendement général inférieur du dollar canadien (CAD) dans la paire CAD/JPY (yen japonais) en position vendeur et la paire AUD (dollar australien)/CAD en position acheteur, mais ce scénario s’est réalisé beaucoup plus rapidement que prévu. En effet, le dollar canadien a été particulièrement plombé par la faiblesse du dollar américain dans son ensemble. Ce dernier subit l’une des compressions les plus importantes et les plus rares depuis des décennies. Toutefois, comme Jerome Powell a récemment exprimé plus d’inquiétudes et d’incertitudes, les appels à un taux final plus élevé de sa part et de la part du reste du Federal Open Market Committee (FOMC) ne semblent pas avoir beaucoup de poids. De plus, le mois de novembre a été marqué par un important changement de corrélation : alors que le dollar américain n’était sensible qu’au resserrement au début de l’automne, le billet vert montre maintenant autant de sensibilité, sinon plus, à un assouplissement dont tient déjà compte la courbe.

Cela signifie que la paire USD/CAD est probablement à la baisse pour le moment. Cependant, nous répétons que le dollar canadien fait partie des devises qui inspirent le plus de pessimisme chez nous pour 2023. Étant donné que la BdC indique que le cycle de resserrement approche de sa fin ou, du moins, qu’il est peu probable qu’il soit aussi énergique, on se concentrera sur les facteurs idiosyncrasiques qui font l’objet d’avertissements de notre part depuis longtemps, particulièrement à mesure que la Fed diminue la cadence. L’endettement effréné qui a soutenu les expansions canadiennes dans le passé en raison de la faiblesse des taux d’intérêt est terminé.

Nous souhaitons demeurer des vendeurs stratégiques du dollar canadien au cours de la nouvelle année. Sur le plan tactique, nous pensons que la semaine des réunions de la Fed et de la BCE et du dévoilement de l’IPC aux États-Unis pourrait marquer un tournant. La paire EUR (euro)/CAD pourrait selon nous connaître un recul à la fin de l’année.

Stratégie liée aux taux

Dans l’ensemble, les écarts de taux entre le Canada et les États-Unis avoisinent les niveaux les plus généreux des 30 dernières années, mais nous entrevoyons toujours la possibilité d’atteindre -100 pdb pour les titres à 5 ans (une hypothèse soutenue par la sensibilité canadienne à la dette et par les efforts américains déployés pour éviter un atterrissage brutal, au moins pour le premier semestre de 2023). Toutefois, nous y voyons un avantage, car le potentiel d’aplatissement est beaucoup plus grand par rapport aux États-Unis. Cette tendance à l’aplatissement est soutenue par la décision du Canada de recommencer à émettre moins de titres à 10 ans et à échéance éloignée par rapport aux titres à échéance plus rapprochée. De plus, nous continuerons d’effectuer des opérations tactiques avec les solides mois de prolongation (avril, juin, septembre et décembre), surtout lorsqu’ils correspondront à un mois sans adjudication 30 ans, comme nous l’avons vu en juin, septembre et décembre cette année. Nous tenons à souligner que ces périodes de hausse de la demande et de baisse de l’offre ont tendance à être les mois catalyseurs de la transition de la situation dans son ensemble.

Du point de vue de la durée et de la courbe elle-même, nous adoptons une position neutre, les taux à 30 ans et la courbe des obligations à 10 ans/30 ans se situant près du milieu de la fourchette depuis le début des hausses. Nous préférons utiliser des structures aplatissement haussier/pentification baissière pour nous orienter dans le marché à l’avenir lorsque nous ne jumelons pas les opérations liées à la durée et à la courbe avec les marchés américains ou autres. Pour le moment, nous maintenons le cap et nous espérons ne pas rater la prochaine reprise importante de la durée. La volatilité de fin d’année et les pressions inflationnistes persistantes sont les principales raisons pour lesquelles nous restons sur la touche, mais nous ferons preuve de dynamisme dans nos achats en période de repli de la durée si nous en avons l’occasion.

Photo d’Andrew Kelvin


Premier directeur et stratège en chef, Canada, VMTD

Photo d’Andrew Kelvin


Premier directeur et stratège en chef, Canada, VMTD

Photo d’Andrew Kelvin


Premier directeur et stratège en chef, Canada, VMTD

Photo de Robert Both


Vice-président et stratège, Macroéconomie, VMTD

Photo de Robert Both


Vice-président et stratège, Macroéconomie, VMTD

Photo de Robert Both


Vice-président et stratège, Macroéconomie, VMTD

Photo de Chris Whelan


Directeur et stratège principal, Taux, VMTD

Photo de Chris Whelan


Directeur et stratège principal, Taux, VMTD

Photo de Chris Whelan


Directeur et stratège principal, Taux, VMTD

Photo de Mazen Issa


Directeur et stratège principal, Opérations de change, VMTD

Photo de Mazen Issa


Directeur et stratège principal, Opérations de change, VMTD

Photo de Mazen Issa


Directeur et stratège principal, Opérations de change, VMTD

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