FOMC de mai : Tout va bien?

12 mai 2023 - 4 minutes
Entrée principale de l’édifice de la Réserve fédérale américaine

Comme prévu, le Federal Open Market Committee (FOMC) a augmenté de 25 points de base (pdb) la fourchette cible des fonds fédéraux, qui s’établit désormais entre 5,00 % et 5,25 % (TD et consensus : +25 pdb). Le président de la Réserve fédérale américaine (Fed), Jerome Powell, a évoqué l’inflation de base obstinément élevée et un marché de l’emploi solide pour justifier cette nouvelle augmentation de taux. Cependant, la déclaration du FOMC et M. Powell durant sa conférence de presse soulignaient que le resserrement des conditions de crédit pèsera sur l’activité économique, et ce, de manière plus prononcée qu’il était convenu à l’issue de la réunion de mars. C’est un facteur à prendre en compte pour évaluer le niveau de resserrement découlant du taux.

Tout porte à croire que la Fed éprouve des difficultés à trouver le juste équilibre entre le resserrement des conditions de crédit et la dynamique de l’inflation qui reste supérieure à la cible. Cependant, les données sur les prêts bancaires donnent à penser que tout resserrement excessif des conditions de crédit, au-delà de celui qu’implique la politique de resserrement de la Fed, ne semble pas s’être produit pour l’heure. Si l’on analyse ces tendances de plus près, on constate que le ralentissement dans le segment des prêts bancaires est principalement imputable à l’octroi de crédits aux entreprises, essentiellement en raison de la diminution des crédits accordés par les plus petites banques.

À l’échelle de l’économie, les prêts bancaires directs représentent un pourcentage relativement faible du passif des entreprises. De plus, rien n’indique que le stress financier ait pris une dimension plus systématique. Par conséquent, les signes d’un resserrement imminent du crédit ne se manifestent pas encore vraiment, et la Fed ne s’est pas encore prononcée sur la suite des choses.

Viennent ensuite les données sur l’inflation et le marché de l’emploi. L’indice du coût de l’emploi (ICE) pour le premier trimestre a clairement indiqué que la décélération de la croissance des salaires s’est avérée beaucoup plus lente que prévu. Finalement, la croissance des salaires demeure très élevée par rapport à la fourchette de 3 % à 3,5 % qui correspond à la cible d’inflation de 2 % de la Fed, ce qui a également été reconnu par le président Jerome Powell lors de sa conférence de presse. Pour ce qui est de l’inflation, le rapport de mars sur l’indice des dépenses personnelles de consommation (DPC) a fait état d’une accélération du taux d’inflation de base provoquée par la combinaison d’une inflation des services de base qui demeure élevée et de prix des biens de base qui n’ont plus d’effet désinflationniste.

Ainsi, la mesure de l’inflation de base, à savoir l’inflation des services de base des DPC hors logement, que la Fed considère comme un indicateur essentiel de sa politique d’établissement des taux, ne montre aucun signe de ralentissement en vue d’atteindre la cible de 2 % fixée par la Fed. Il y a donc lieu de croire que les pressions inflationnistes sous-jacentes demeurent élevées. En effet, le président Powell a fait remarquer que l’inflation des services hors logement n’a pas beaucoup changé et demeure relativement stable. La Fed croit donc que la demande devra fléchir légèrement et que les conditions du marché de l’emploi devront s’assouplir encore un peu pour qu’on commence à constater des progrès. Un marché de l’emploi solide maintiendra l’inflation de base des DPC en 2023, clôturant l’année sous la barre des 4 %, grâce à des coûts salariaux élevés et à une demande globale soutenue.

La fin des hausses est-elle imminente?

Le FOMC approche de la fin de l’actuel cycle de resserrement, mais il lui reste encore à décider du taux maximal approprié. Ses membres s’inquiètent des répercussions imprévisibles du resserrement des conditions de crédit, mais aussi du taux d’inflation de base qui reste obstinément élevé et semble se stabiliser au-dessus de la cible. En réalité, ce contexte risque d’accroître la dépendance de la Fed à l’évolution des données. Jerome Powell a laissé entendre qu’un resserrement supplémentaire n’était pas à exclure. La Fed surveillera de près les données sur l’inflation et le marché de l’emploi d’ici la réunion de juin pour déterminer si un taux d’intérêt maximal de 5,25 % est approprié ou non. Par conséquent, nous maintenons notre prévision d’une hausse finale de taux de 25 pdb en juin, mais la probabilité d’une hausse de taux le mois prochain a diminué par rapport à celle qui prévalait avant la réunion. Cette ultime hausse dépendra des données qui seront communiquées d’ici la réunion de juin.

Au-delà de la réunion de juin, la stratégie de la Fed consiste à maintenir le taux final aussi longtemps que nécessaire (« élevé pour longtemps »). Dans la mesure où une récession est susceptible de survenir au quatrième trimestre et où le taux de chômage risque de toucher les 4 %, nous pensons que la Fed réduira timidement le taux des fonds fédéraux de 25 pdb en décembre, puisque l’inflation de base devrait se situer à peine en dessous de 4 % au quatrième trimestre. Nous prévoyons que la plupart des répercussions de la récession prévue seront concentrées en 2024, car le chômage devrait passer de 4 % au quatrième trimestre 2023 à 5,5 % au quatrième trimestre 2024. Par conséquent, la désinflation qui devrait en résulter permettrait à la Fed de se lancer dans une politique d’assouplissement plus audacieuse, si bien qu’elle pourrait abaisser le taux des fonds fédéraux de 275 pdb au total pour arriver à un taux plancher de 2,75 % (limite supérieure) en 2024.

Toutefois, cela suppose un retour progressif de l’inflation à long terme à la cible de 2 % d’ici la fin de 2025. Dans le cas contraire, comme le laisse penser la tendance actuelle de l’inflation, la désinflation en 2024 sera probablement bien plus modeste malgré la récession, ce qui posera un dilemme à la Fed, qui devra faire un choix entre sa cible d’inflation et un assouplissement radical pour faire face à la hausse du chômage. Cela pourrait se traduire par un assouplissement moins important que prévu en 2024. Ainsi, nous estimons actuellement que les baisses totales de taux à partir de décembre 2023 ne dépasseront pas les 275 pdb.

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Portrait de Oscar Muñoz


Vice-président et stratège, Macroéconomie aux États-Unis, Valeurs Mobilières

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