Invité : Sami Inkinen, cofondateur et chef de la direction, Virta Health
Animateur : Charles Rhyee, analyste, Soins de santé, TD Cowen
Aujourd’hui, on parle des GLP-1 en ce qui a trait à l’obésité et à la perte de poids, mais ces médicaments ne sont pas nouveaux. Ils sont utilisés depuis près de 20 ans pour le traitement du diabète de type 2. Enfin, les coûts associés au traitement du diabète et de l’obésité aujourd’hui sont effarants. On estime que le coût total du diabète diagnostiqué aux États-Unis en 2022 était de 412,9 milliards de dollars, y compris 306,6 milliards de dollars en coûts médicaux directs et 106,3 milliards de dollars en coûts indirects. De même, les chiffres sur l’obésité sont décourageants. Les Centers for Disease Control and Prevention (CDC) estiment qu’un enfant sur cinq et deux adultes sur cinq sont obèses, et les National Institutes of Health (NIH) ont estimé en 2016 que les coûts médicaux globaux attribuables à l’obésité adulte aux États-Unis s’élevaient à 260,6 milliards de dollars, montant qui n’a fait qu’augmenter depuis. Il est clair que le modèle de traitement actuel de l’obésité et du diabète ne fonctionne pas.
Dans cet épisode, nous discutons de la crise de l’obésité, et en particulier de l’essor des GLP-1 pour lutter non seulement contre le diabète et l’obésité, mais aussi contre un nombre croissant d’autres comorbidités. Nous parlons aussi de la question plus large de la santé et de la façon dont on devrait traiter les maladies chroniques, qui, aujourd’hui, font en grande partie l’objet de traitements pharmaceutiques. De plus en plus, nous observons un mouvement vers d’autres approches axées sur des domaines comme le changement comportemental et la nutrition qui peuvent, en fait, avoir un impact tout aussi durable, sinon plus, sur la santé globale.
Pour nous aider à discuter de ces sujets et plus encore, nous accueillons Sami Inkinen, cofondateur et chef de la direction de Virta Health, dont la mission est d’inverser le diabète et l’obésité chez un milliard de personnes. Aujourd’hui, Virta travaille avec plus de 500 grands employeurs, régimes de santé et organismes gouvernementaux partout au pays, et a déjà aidé plus de 100 000 membres à inverser leur diabète et leur obésité. M. Inkinen est titulaire d’une maîtrise en génie physique de l’Université de technologie d’Helsinki et d’une maîtrise en administration des affaires de l’Université de Stanford. Sami, merci de vous joindre à moi aujourd’hui.
Sections | |
---|---|
0:26 | Introduction |
2:21 | Quel est le rendement des dépenses publiques consacrées au diabète? |
5:06 | Pourquoi les coûts moyens pour le traitement du diabète augmentent-ils? |
6:31 | Pourquoi n’avons-nous pas réussi à traiter le diabète? |
10:15 | Pourquoi les médecins ont-ils du mal à convaincre les patients de respecter leurs régimes/plans d’exercice? |
12:30 | Que fait Virta? |
16:10 | Comment Virta tire-t-elle parti de la technologie? |
18:45 | Y avait-il une résistance à l’idée de « renverser » la tendance vers le diabète? |
23:05 | L’idée de « renverser » devient-elle plus acceptée? |
25:40 | Votre expérience avec les GLP-1 donne-t-elle un avantage sur le marché de l’obésité? |
27:44 | En quoi l’objectif d’inverser l’obésité diffère-t-il de l’objectif d’inverser le diabète? |
31:17 | Que pensez-vous de la récente hausse de popularité des GLP-1? |
34:50 | Les GLP-1 sont-ils plus faciles à utiliser que Virta? |
37:20 | Comment Virta a-t-elle été en mesure de réduire les coûts liés aux GLP-1? |
41:10 | Comment pouvons-nous empêcher les utilisateurs des GLP-1 de reprendre du poids? |
44:45 | Y a-t-il un rôle à jouer pour la télésanté en ce qui a trait aux GLP-1? |
47:20 | Quel sera l’effet des GLP-1 administrés par voie orale? |
49:30 | Quelles sont vos perspectives sur cinq ans pour ce marché? |
Ce balado a été enregistré le 15 avril 2025.
Locuteur 1 :
Bienvenue à Insights de TD Cowen. Ce balado réunit des penseurs de premier plan qui offrent leur éclairage et leurs réflexions sur ce qui façonne notre monde. Soyez des nôtres pour cette conversation avec les esprits les plus influents de nos secteurs mondiaux.
Charles Rhyee :
Bonjour, ici Charles Rhyee, analyste en distribution et technologies de soins de santé chez TD Cowen. Bienvenue à notre série de balados La santé au futur. Cet épisode proposé par TD Cowen fait partie de notre série régulière de balados qui rassemblent leaders d’opinion, innovateurs et investisseurs pour explorer comment la convergence entre soins de santé, technologies, consommation et politiques change notre perception de la santé, des soins et du système de santé. L’épisode d’aujourd’hui aborde la crise de l’obésité, en particulier, l’essor des médicaments GLP-1 pour lutter contre l’obésité, mais aussi contre un nombre croissant de maladies. Il sera aussi plus largement question de la santé et de la façon dont on devrait soigner les maladies chroniques, qui font aujourd’hui souvent l’objet de traitements pharmaceutiques. De plus en plus, on observe d’autres approches, comme le changement comportemental et la nutrition, qui peuvent avoir un effet au moins aussi durable sur la santé globale.
Pour discuter de ces sujets et plus encore, je reçois Sami Inkinen, cofondateur et chef de la direction de Virta Health, dont la mission est d’inverser le diabète et l’obésité chez un milliard de personnes. Virta travaille aujourd’hui avec plus de 500 grands employeurs, régimes de santé et organismes gouvernementaux partout au pays et a déjà aidé plus de 100 000 membres à inverser le diabète et l’obésité. Sami est titulaire d’une première maîtrise en génie physique de l’Université de technologie d’Helsinki et d’une seconde en administration des affaires de Stanford. Sami, merci de votre présence.
Sami Inkinen :
Merci de me recevoir, Charles. La discussion s’annonce intéressante.
Charles Rhyee :
Je veux d’abord discuter des grands sujets : le diabète et l’obésité. Évidemment, il va souvent être question des médicaments GLP-1. Aujourd’hui, la plupart des gens les associent à l’obésité et à la perte de poids. Les médicaments GLP-1 ne sont pas nouveaux. Virta doit composer avec certaines réalités depuis des années quand il est question de gérer et d’inverser le diabète. De ce point de vue, on estime que le coût total du diabète diagnostiqué aux États-Unis en 2022 était de 413 milliards, dont environ 307 milliards en coûts médicaux directs et 106 milliards en coûts indirects imputables au diabète. Qu’est-ce qu’on obtient aujourd’hui pour toutes ces dépenses? On dirait que le diabète ne recule pas aux États-Unis.
Sami Inkinen :
C’est une très bonne question. Pour faire court, je dirais pas grand-chose. Voici les faits. Premièrement, il n’y a jamais eu autant de cas de diabète de type 2 aux États-Unis. Deuxièmement, le coût total de la lutte contre le diabète de type 2 aujourd’hui n’a jamais été aussi élevé. Et, troisièmement, ce qui est encore plus alarmant, le coût unitaire pour traiter chaque personne atteint des sommets. Mais, il y a pire encore. Quatrièmement, JAMA a publié il y a quelques années un article évalué par les pairs selon lequel les résultats cliniques du diabète de type 2 ne se sont pas améliorés aux États-Unis dans la dernière décennie. La réponse à votre question, c’est que le traitement des symptômes du diabète de type 2, soit l’hyperglycémie, par un nombre croissant de médicaments n’est pas très efficace. Cette approche pose un problème fondamental du fait que le traitement pharmacologique des symptômes n’enraye pas la maladie.
Il faut plutôt, comme le fait Virta, s’attaquer à la cause profonde du diabète de type 2, la nutrition, pour inverser la maladie. C’est la stratégie fondamentale à adopter pour réduire les coûts et améliorer la santé. Voilà donc le problème fondamental : on gère la maladie, au lieu de l’inverser. Il faut le dire, parce que certains auditeurs vont se demander alors pourquoi prescrire ces médicaments et se contenter de gérer la maladie.
L’hypothèse se confirme par le fait que la prise en charge du diabète de type 2 consiste habituellement à retarder ou à éviter – mais surtout à retarder – les complications micro- et macrovasculaires. Une complication microvasculaire peut amener à perdre la vue ou à se faire amputer les doigts, les orteils ou les jambes. Une lésion macrovasculaire peut entraîner une crise cardiaque. La prise continue d’antidiabétiques vise à réduire la glycémie et à retarder ou, dans certains cas, à éviter les complications ultimes du diabète de type 2. Mais, je le répète, à la lumière de toutes les données, on ne peut pas se contenter de l’état actuel des choses; il faut plutôt inverser la maladie.
Charles Rhyee :
Votre troisième point est particulièrement intéressant, à savoir que le coût unitaire du traitement du diabète ne fait qu’augmenter. Selon vous, quel est aujourd’hui le plus grand facteur sous-jacent rattaché au coût unitaire du traitement du diabète de type 2?
Sami Inkinen :
Je pense qu’il y en a deux, principalement. Premièrement, les coûts globaux des soins de santé. Ça inclut les services médicaux et les médicaments. Le coût unitaire augmente plus rapidement que l’inflation et le PIB aux États-Unis. C’est le premier facteur. Tout ce qui se fait en soins de santé aux États-Unis coûte plus cher chaque année, relativement parlant, que tout le reste. Deuxièmement, l’innovation ne change pas fondamentalement le cours de la maladie. Il y a toujours un nouveau médicament qui arrive sur le marché. L’insuline est une innovation vieille de plus de 100 ans, mais son coût unitaire monte en flèche année après année. Il a diminué un peu il y a quelques années, surtout parce qu’un nouveau médicament suscitait de plus en plus d’intérêt. Bien sûr, je parle des médicaments GLP-1, qui, là encore, coûtent de plus en plus cher. Tous les soins de santé coûtent plus cher. Deuxièmement, il y a l’« innovation réelle ». À part Virta, je dirais cependant que l’on se contente de gérer la maladie. Cette croissance multipliée par deux fait que le coût unitaire continue d’augmenter.
Charles Rhyee :
Oui. Sans vouloir effrayer personne davantage, je pense que les chiffres sur l’obésité sont également effarants. Selon les CDC, un enfant sur cinq et deux adultes sur cinq souffrent d’obésité. Les NIH estimaient en 2016 que le coût médical global de l’obésité chez les adultes aux États-Unis se chiffrait à 261 milliards, ce qui, j’imagine, n’a fait qu’augmenter. Et c’était avant même l’arrivée des médicaments GLP-1. Qu’est-ce qu’on fait pour s’attaquer au problème et pourquoi les résultats sont-ils décevants?
Sami Inkinen :
Votre conclusion est juste : dans le diabète de type 2, tout ce qu’on fait ne fonctionne clairement pas. C’est une réalité objective. Personne ne peut le nier. Comme pour le diabète de type 2, il n’y a jamais eu aux États-Unis autant de cas d’obésité ou de surpoids. Notre action est inefficace. Qu’est-ce qu’on faisait avant? On répète souvent, comme un mantra, qu’il faut suivre un régime et faire de l’exercice. Mais les recommandations liées au régime et à l’exercice ne fonctionnent clairement pas. L’ancien chef de la direction de WeightWatchers, une entreprise qui vient ironiquement de déclarer faillite, a reconnu publiquement il y a quelques mois, en 2024, que compter les calories et les points ne fonctionne pas.
Et c’est vrai. Compter les calories et souffrir en réprimant la faim, ça ne fonctionne pas, tout simplement. La volonté s’épuise et plus rien ne tient, habituellement à la photo de mariage. On reprend alors le poids perdu. De toute évidence, la deuxième approche dynamique, qui consiste à compter les calories en se serrant la ceinture, ne fonctionne pas. C’est inefficace. L’autre chose qui cloche, c’est toute l’industrie des compléments alimentaires. Quiconque a déjà ouvert un magazine de mise en forme ou visité une boutique GNC sait que l’industrie empoche des milliards en faisant avaler aux consommateurs toutes sortes de produits dans l’espoir de maigrir, mais sans succès. Et, du point de vue clinique, deux méthodes s’attaquent à l’obésité avec des résultats variables.
À un bout du spectre, il y a différentes chirurgies bariatriques très invasives et très coûteuses qui donnent de très bons résultats cliniques. Il faut dépenser des dizaines de milliers de dollars et c’est très risqué. Environ 0,1 ou 0,2 % des personnes obèses, je pense, subissent encore ce genre d’opération par année aux États-Unis. Et puis, il y a aussi en quelque sorte la première génération de médicaments amaigrissants, qui donnent certains résultats, mais causent aussi beaucoup d’effets secondaires. Voilà l’ensemble des choses qu’on a essayées, mais, là encore, les données en confirment l’inefficacité. On peut tenter d’en expliquer les raisons et de proposer une meilleure solution, mais on fait face quand même à une explosion des cas de diabète de type 2 et d’obésité malgré tous nos efforts.
Charles Rhyee :
Je voudrais revenir sur le mantra qu’il faut manger moins et faire de l’exercice. Le milieu médical le répète aux patients sans vraiment préciser comment faire. Pourquoi n’offre-t-on pas de meilleurs conseils dans ce domaine, selon vous?
Sami Inkinen :
Je vois deux choses. D’abord, les outils qui sont fournis aux médecins. Premièrement, je pense que les médecins de première ligne sont bien intentionnés; ils font de leur mieux. Ce n’est pas leur faute; ils sont pris pour dire au patient ce qu’il ne doit pas faire. On ne leur a pas fourni les outils nécessaires. Je dois dire deux choses. Et je sympathise avec les médecins qui voient des patients en surpoids de 20 kilos, à qui ils conseillent de mieux manger, de faire de l’exercice. À la visite suivante, le patient accuse 20 kilos en trop – j’invente un chiffre – puis c’est 30 kilos, et la prise de poids continue. Quels sont les outils qu’ils n’ont pas reçus? Premièrement, les écoles de médecine n’offrent pas vraiment de formation en nutrition. À Harvard comme à Stanford, l’étudiant en médecine reçoit moins d’une heure de formation sur la nutrition. En fin de compte, la nutrition n’est pas le seul facteur d’obésité, mais c’est le plus important.
Et deuxièmement, les outils dont dispose le médecin ne permettent pas d’offrir des soins ou du soutien continus à distance. Le patient peut consulter une, deux, trois ou quatre fois par année, mais il est laissé à lui-même 362 ou 361 jours. Ce sont les deux aspects qui manquent aux médecins, à savoir la formation en nutrition et les outils pour soutenir les patients de façon continue. Ce ne sont que deux aspects, mais Virta Health s’y est attaqué avec succès et aide à maintenir la perte de poids. Aujourd’hui, j’aime à dire que nos résultats sont comparables à ceux d’Ozempic sans médicament pour la perte de poids et le contrôle de la glycémie. On pourra y revenir tout à l’heure. Mais, oui, je sympathise avec les médecins On les place dans une situation intenable.
Charles Rhyee :
Vous me donnez l’occasion idéale d’enchaîner. Pour ceux qui connaissent Virta, notre approche s’apparente au régime cétogène. Je simplifie à l’extrême et ce n’est probablement pas la bonne façon de présenter la chose. J’aimerais, Sami, que vous nous donniez plus de détails pour comprendre un peu mieux ce que fait Virta, surtout pour ceux qui ne connaissent pas très bien l’entreprise.
Sami Inkinen :
Bien sûr. Tout d’abord, notre approche privilégie la nutrition et s’appuie sur une supervision médicale réelle et à distance pour atteindre nos résultats. À la base, notre « molécule thérapeutique » repose sur la nutrition par des changements dans le mode de vie. Les résultats en dépendent. Et ça se combine à l’apport de médecins et de coachs, qui ont accès à la technologie, à l’IA et à des logiciels pour offrir aux patients un soutien très étroit et personnalisé. En ce qui concerne les résultats, les auditeurs doivent comprendre : ce dont on parle ici est très transformateur. Pour ce qui est du surpoids, on a publié dans un article évalué par les pairs les résultats d’un essai clinique de cinq ans incluant tous les sujets retenus au début. La perte de poids est de 13 % la première année et se maintient après deux ans. On n’a pratiqué aucune sélection. Dans ce contexte, une perte de poids de 13 % la première et la deuxième année se compare aux résultats réels publiés sur les médicaments GLP-1. Une perte de poids de cette ampleur, c’est presque du jamais-vu.
On peut aussi parler des résultats pour le diabète de type 2. Des patients cessent l’insuline et les médicaments, et voient leur glycémie diminuer, sans parler des autres marqueurs métaboliques de la maladie cardiovasculaire qui s’améliorent. Mais comment y parvenir? J’en reviens aux deux aspects mentionnés : un changement de mode de vie axé sur la nutrition, combiné à un soutien nutritionnel. Il importe de souligner que tout est très personnalisé. On obtient du succès chaque jour auprès des végétaliens, des végétariens, des carnivores. C’est aussi le cas avec les camionneurs et plusieurs tribus amérindiennes, des populations qui doivent souvent se contenter de la nourriture offerte par les casinos, les restaurants-minute et les dépanneurs. Notre succès s’étend aussi aux personnes qui cuisinent à la maison. Il faut s’en souvenir. Parfois, on accuse Virta d’offrir la même solution à tout le monde.
Dans ce cas, notre succès se limiterait peut-être à une personne sur 10 000. Ça ne fonctionne tout simplement pas. Tout est hautement personnalisé. Sur le plan de la nutrition, la réduction de l’apport en glucides est un élément clé pour diminuer la faim et les fringales. Mais, au-delà de ça, tout est très individualisé. On peut avoir le meilleur protocole nutritionnel au monde, mais, il faut le suivre à la lettre, pas nécessairement chaque heure, mais au moins quotidiennement. Résultat, les gens baissent les bras, se découragent. Deuxième élément que j’ai déjà mentionné, les médecins et les coachs, qui sont des employés à temps plein chez nous, soit dit en passant, établissent habituellement une relation longitudinale de près de trois ans avec les patients. Cette équipe de soins offre un soutien quotidien en fonction de la réaction du corps à ce qu’on demande au patient.
On fait de la surveillance à distance et on collecte chaque jour sur chaque patient une foule de données à partir desquelles on peut, par exemple, conseiller de réduire l’apport en protéines ou d’augmenter l’apport en sodium, ou trouver une solution pour le souper, si ça pose un problème. Quand on combine ces deux éléments : changements dans le mode de vie et soutien étroit axé sur l’aspect humain et la technologie – et j’insiste, c’est beaucoup plus facile à dire qu’à faire – on arrive aux résultats que l’on voit.
Charles Rhyee :
Comment exploitez-vous la technologie? Avec un coaching intensif, beaucoup pensent qu’il peut être difficile d’atteindre un certain volume. Pourtant, vous prenez en charge des centaines de patients et gérez des centaines de milliers de membres. Dites-moi, comment la technologie permet-elle d’obtenir les résultats observés jusqu’à présent?
Sami Inkinen :
C’est périlleux de prendre Tesla en exemple ces jours-ci, mais d’une certaine façon, notre histoire pourrait se comparer au développement de Tesla et de la conduite autonome. Tout d’abord, on utilise la technologie pour surveiller à distance plusieurs biomarqueurs du patient. C’est l’équivalent chez Tesla des capteurs et des caméras qui offrent une rétroaction presque en temps réel. En arrière-plan, toujours par analogie avec la voiture, notre algorithme et notre logiciel cherchent à déterminer si le patient et ses biomarqueurs débordent ou suivent les lignes blanches. Ensuite, il s’agit de reproduire le comportement, comme une voiture autonome qui arrive à un coin de rue et détecte qu’il faut tourner à gauche. Toujours en poursuivant l’analogie, le coach est le conducteur et le médecin tient toujours le volant.
En ce sens, la conduite n’est pas entièrement autonome. La rétroaction au patient est parfois instantanée à l’aide de logiciels et de l’IA. D’autres fois, selon la nature clinique de la recommandation, la personne, le coach ou le médecin va communiquer avec le patient. Et puis, évidemment, il y a l’élément humain, l’empathie. La famille peut vivre un deuil. Après le « jour de la libération », les mises à pied risquent d’être nombreuses dans les entreprises.
Il y a beaucoup de stress au travail, etc. Nos coachs et nos médecins sont particulièrement bien outillés pour gérer l’aspect humain. On ne vante pas notre côté humain pour ensuite interagir avec le patient en utilisant l’IA ou un logiciel. On distingue clairement ce qui est automatisé et si l’IA aide le membre, puis on choisit un coach et un médecin. Enfin, les logiciels et de plus en plus l’IA décuplent l’efficacité de notre équipe de soins en automatisant les tâches répétitives. Ça permet là encore de se concentrer sur les aspects plus complexes, comme l’empathie et la prise en charge des patients, quand un véritable rapport humain est nécessaire.
Charles Rhyee :
Vous avez une vaste expérience dans le domaine du diabète. Vous soulignez avoir plus de cinq ans de données évaluées par les pairs, qui montrent certains de vos progrès. Je ne sais pas si c’est vous qui avez inventé l’expression, mais, à ma connaissance, vous êtes le premier à parler d’inverser le diabète plutôt que de le gérer. L’idée est aujourd’hui couramment acceptée, mais quelle résistance avez-vous rencontrée au début en parlant d’inverser le diabète?
Sami Inkinen :
Oui, merci de nous attribuer l’expression « inverser le diabète de type 2 ». Mais honnêtement, je pense qu’on est dans la deuxième ou la troisième vague. Il y a 100 ans, avant l’« invention » de l’insuline, l’idée circulait déjà d’inverser par la nutrition le diabète de type 2 et, dans une certaine mesure, le diabète de type 1. À certains égards, les éléments et la façon de traiter et d’inverser le diabète de type 2 ne sont pas nouveaux. Dans les dernières décennies, on s’est un peu éloigné de l’idée d’inverser la maladie avec l’introduction du paradigme de gestion du diabète de type 2 par les antihyperglycémiants. Pour répondre précisément à votre question, oui, on a eu beaucoup de chance. J’ai fondé Virta avec une équipe scientifique incroyable. Mon cofondateur et médecin en chef, le Dr Phinney, a reçu son diplôme de médecine de Stanford dans les années 1970. Il a pratiqué en tant que clinicien, avant d’entrer au MIT pour faire un doctorat en biochimie nutritionnelle. C’est un scientifique et un clinicien brillant. Il a aussi enseigné la médecine à l’université de Californie à Davis. Son apport s’étend sur trois décennies.
L’entreprise comptait sur l’une des équipes scientifiques et cliniques les plus incroyables et tout ce qu’on faisait était fondé sur les données probantes publiées. On savait qu’on avait tout à fait raison et ça se voyait dans les résultats de laboratoire : la glycémie des patients baissait et ils cessaient tous les antidiabétiques. On n’a eu aucune hésitation à savoir s’il était possible d’obtenir une rémission du diabète de type 2 ou de l’inverser. Et ça se produisait sous nos yeux. On s’est fait poser beaucoup de questions. On nous demandait si on était la nouvelle entreprise, après Theranos, à prétendre inverser le diabète de type 2. C’était en 2015-2016. Il fallait réfuter divers arguments : on allait trop loin, ça n’était pas possible. Mais c’est typique lors d’un changement de paradigme. Et je vais faire attention de bien reprendre ce que j’entends souvent. Le changement ne survient pas après un ou deux articles évalués par les pairs.
Il s’installe un enterrement à la fois. C’est un peu bizarre à dire, mais, pour un scientifique clinicien qui associe sa carrière et sa réputation à un seul paradigme selon lequel le diabète de type 2 est une maladie chronique évolutive qu’on ne peut que gérer, c’est très difficile de reconnaître qu’il peut se tromper depuis 20, 30 ou 40 ans et que la nutrition pourrait probablement induire une rémission. C’est très, très difficile à admettre dans tous les domaines scientifiques. Je peux comprendre la résistance, mais, avec tous les articles qu’on a publiés sur des centaines de milliers de patients traités dans le monde, je dois dire que certains se sont même fait tatouer en permanence le logo de Virta Health. Les preuves aux États-Unis de patients qui ont inversé le diabète de type 2 sont aussi nombreuses qu’irréfutables : cette maladie n’est pas une lente condamnation à mort. On peut s’en libérer. Mais il y a encore des gens qui lèvent les yeux au ciel et qui n’y croient pas vraiment. Pourtant, ça se produit chaque jour.
Charles Rhyee :
De toute évidence. Je suis certain qu’il y a encore de la résistance. Quand je suis entré dans le domaine, on disait que le diabète ne pouvait que progresser et qu’il fallait tenter de le ralentir le plus possible. J’entends maintenant d’autres personnes parler d’inverser le diabète. Par simple curiosité, croyez-vous que l’idée fait son chemin dans le milieu médical?
Sami Inkinen :
Tout à fait. Il faut le voir pour le croire. Des établissements cliniques et des entreprises à but lucratif commencent à utiliser l’expression. J’adore ça. C’est fantastique. Il y a quelques années, l’American Diabetes Association a publié un énoncé de position dans lequel elle définissait la rémission du diabète de type 2. Elle a employé le mot « rémission »; on parle essentiellement de la même chose. En définissant la rémission partielle, elle a du coup établi un critère. Non, j’adore ça. Et on ne tient pas à s’en attribuer le mérite, mais c’est absolument fantastique. Même la terminologie n’existait pas officiellement. C’est un peu comme dans le cancer. On parle de rémission, puis, après un certain nombre d’années, de guérison. On définit essentiellement des mots, comment les utiliser. Parce que le cancer ne date pas d’hier. En gros, la même chose s’est produite aux États-Unis, sous la direction de l’American Diabetes Association, du moins pour le traitement du diabète de type 2.
Je m’en réjouis. Et vous avez tout à fait raison, les temps ont changé. Mais si on sonde mille médecins de soins primaires, je ne sais pas quel pourcentage conviendrait que le diabète est bien réversible, mais pas complètement. Il y a encore du chemin à faire. Tous les médecins seront sensibilisés seulement quand les écoles de médecine diffuseront cet enseignement. Je dois dire qu’aucun de nos articles évalués par les pairs et publiés n’est aussi persuasif qu’un patient diabétique traité pendant dix ans quand il déclare à un panel de médecins de première ligne qu’il a cessé l’insuline. Le médecin demande des analyses de laboratoire et constate que le taux d’hémoglobine A1c respecte les valeurs normales. Il suffit d’un patient, d’une anecdote. Généralement, c’est plus convaincant qu’un article publié; le fournisseur n’arrive pas à y croire. Il invite à ne rien changer, à faire la même chose. Trouvant ça incroyable, il se dit qu’il doit lire, étudier et comprendre ce qui se passe.
Charles Rhyee :
Vous me tendez une perche vers le prochain sujet. Les médicaments GLP-1 existent depuis une vingtaine d’années, je dirais. Évidemment, ça n’a rien de neuf pour votre entreprise parce que ces antidiabétiques sont d’emploi courant. La proposition de valeur visait en partie à induire la rémission du diabète ou à l’inverser en adoptant une approche nutritionnelle afin d’abandonner ces médicaments coûteux. Puisque vous êtes dans le domaine depuis un certain temps, vous n’êtes pas sans savoir que ces médicaments sont employés contre l’obésité. Par simple curiosité, votre expérience de ces médicaments vous procure-t-elle des avantages, alors que vous envisagez ou avez entrepris une expansion sur le marché de l’obésité?
Sami Inkinen :
La réponse est « oui ». Pour revenir sur le premier volet de votre question, si je me souviens bien, la FDA a approuvé en 2005 le premier médicament GLP-1 aux États-Unis. De fait, cette catégorie de médicaments n’est pas nouvelle. En 2015, il y a exactement 20 ans, on a commencé à traiter des patients aux États-Unis. Notre essai clinique fondé sur la télémédecine remonte quant à lui à 10 ans. Nos fournisseurs comptent environ dix ans d’expérience dans la prescription, la gestion, la désinscription, la prise en charge des symptômes et tout ce qui accompagne la prescription d’un médicament. Ils cherchent à en tirer le maximum dans le contexte du diabète de type 2, qui n’est pas très différent pour une personne « simplement obèse ». Cette décennie d’expérience de nos fournisseurs a fait en sorte qu’on s’est trouvés au bon endroit au bon moment lorsque les premiers médicaments GLP-1 ont été approuvés dans l’obésité il y a quelques années. Je pense à la marque Wegovy, de Novo Nordisk, la même molécule qu’Ozempic.
C’est très utile, parce que, parfois, les patients qui nous consultent prennent un médicament GLP-1 pour l’obésité. Alors, on sait comment gérer ces produits et peut-être retirer la prescription, s’il y a lieu. Deuxièmement, les promoteurs et les employeurs qui offrent des régimes de soins de santé sont à l’affût d’approches nutritionnelles pour lutter contre l’obésité. Mais ils sont de plus en plus nombreux à se demander qui peut les aider à gérer et à prescrire ces médicaments de façon responsable. C’est donc très utile dans le contexte clinique avec les consommateurs, les entreprises et les clients.
Charles Rhyee :
Quelle est la différence entre inverser l’obésité et le diabète, à la fois du point de vue des programmes et dans votre façon d’aborder la chose en général? Qu’est-ce qui différencie l’approche aux patients dans les deux cas?
Sami Inkinen :
Certains aspects sont très différents et d’autres semblables. Je vais commencer par la différence entre les approches nutritionnelle et générale associées au traitement du diabète de type 2 par rapport à l’obésité. Dans le diabète de type 2, la sécurité comporte des enjeux bien plus importants, parce que les hypoglycémiants modifient la glycémie; il faut la surveiller de très près. Je donne un exemple précis. Si vous prenez de l’insuline ou même des sulfonylurées et qu’on abaisse rapidement votre glycémie par la nutrition, notre fournisseur doit être très alerte et penser à réduire les hypoglycémiants pour éviter l’hypoglycémie. La sécurité et la surveillance de la glycémie entrent en jeu. Par conséquent, le traitement clinique du diabète de type 2 est beaucoup plus intensif que celui de l’obésité, qui met l’accent sur la nutrition et les changements dans le mode de vie.
L’autre différence a trait aux attentes et à l’état émotionnel, si vous voulez, des personnes atteintes d’obésité. Souvent, dans le cas du diabète de type 2, les personnes comprennent qu’elles vont devoir composer avec cette maladie. Et il y a moins de honte; même si le sentiment est présent. Presque toutes les personnes obèses éprouvent une forte honte, quelle qu’en soit l’origine sociétale. Je me contenterai de dire ça. Elles ont l’impression de vivre un échec. J’ai échoué, pourtant, j’ai bien essayé... La plupart ont déjà suivi de cinq à dix programmes nutritionnels, voire plus, avant de faire appel à Virta. On entend souvent ce sentiment d’échec avec l’obésité. Ça ne devrait pas, mais c’est comme ça que les gens se sentent. Par comparaison, dans le cas du diabète de type 2, les patients l’acceptent en se disant que c’est peut-être génétique.
Il y a donc des éléments pratiques et cliniques. Il faut apprendre à composer avec cette différence. Mais aussi, l’état émotionnel dans les cas d’obésité est très différent. Ça pourra en surprendre certains, mais les facteurs sous-jacents d’un dysfonctionnement métabolique sont à peu près les mêmes. Notre approche nutritionnelle n’est pas si différente, voire pas du tout. On traite la résistance à l’insuline et l’inflammation, dont les symptômes se manifestent par l’hyperglycémie. Habituellement, on constate une prise de poids qui découle d’une faim constante. Voilà pour l’obésité. Et il y a aussi les lipides, les marqueurs de maladie cardiovasculaire, l’hypertension. Dans le cas précis de l’hyperglycémie associée au diabète de type 2, du surpoids lié à l’obésité ou de valeurs inquiétantes pour les lipides et la tension artérielle, la prise en charge des facteurs sous-jacents repose à peu près sur la même approche nutritionnelle. Il y a plus de similitudes qu’on pense.
Charles Rhyee :
Ces dernières années, on constate une explosion de la demande de médicaments GLP-1 pour perdre du poids. Évidemment, des entreprises comme Nova et Lily en profitent. Selon vous, globalement, dans quelle mesure cette catégorie de médicaments est-elle importante, et pas seulement dans l’obésité? On en voit les effets positifs dans l’apnée du sommeil et l’insuffisance cardiaque globale; les résultats de santé sont assez impressionnants. Les aviez-vous déjà observés au cours des dix dernières années dans le suivi des cas de diabète de type 2? J’aimerais vous entendre sur ce que j’appellerais une tendance lourde plutôt qu’une mode. Je veux parler de cet enthousiasme des dernières années pour les médicaments GLP-1, de leur importance pour la perte de poids et d’autres bienfaits pour la santé.
Sami Inkinen :
Oui. La catégorie de médicaments GLP-1 est assurément très intéressante et efficace pour traiter l’hyperglycémie dans le diabète de type 2, mais aussi pour favoriser la perte de poids. Par rapport à la première génération des médicaments amaigrissants, les effets secondaires sont beaucoup moins importants, ce qui fait l’intérêt de cette catégorie. C’est indéniable, et je n’hésite pas à dire que c’est un meilleur médicament que bien d’autres pour maîtriser la glycémie ou perdre du poids. Par contre, les gens ont tendance à penser qu’il s’agit d’un médicament miracle pour la perte de poids, mais aussi pour l’apnée du sommeil, telle maladie cardiaque, etc. À mon sens, c’est exagéré. Pourquoi? J’ai quelques raisons de le croire. D’abord, on sait depuis très longtemps qu’un IMC autour de 40 correspond à un surpoids ou à un excès de graisse corporelle de près de 50 kilos.
En perdant ce surpoids, on élimine presque toutes les comorbidités métaboliques. Permettez-moi d’illustrer ce fait de façon encore plus saisissante. Virta a publié des articles approuvés par les pairs avant que les fabricants de médicaments GLP-1 communiquent leurs résultats de comorbidité. Nos résultats montrent que le sommeil s’améliore et que l’apnée du sommeil est souvent inversée. Les marqueurs hépatiques et rénaux s’améliorent aussi. En fait, on a réussi à ramener la néphropathie chronique du stade 3b à 3a, à réduire l’hypertension et à améliorer considérablement les marqueurs de risque de maladie cardiovasculaire sur dix ans. Je crois l’avoir mentionné, l’hypertension diminue et les symptômes de dépression s’estompent. Reste à savoir si c’est uniquement à cause de la perte de poids ou de l’amélioration de la résistance à l’insuline ou de l’inflammation, et quel mécanisme est en jeu.
Finalement, en favorisant une perte de poids importante par la nutrition, on observe plus ou moins les mêmes résultats que ceux des fabricants de médicaments GLP-1. Je pense que c’est un peu exagéré de dire qu’à lui seul un médicament traite cinq comorbidités chroniques. Il faut comprendre que, si on peut aider les gens à perdre du poids, à ramener leur indice de masse corporelle de 40 à 25 ou 27, ils sont très susceptibles d’améliorer l’ensemble de leur santé.
Charles Rhyee :
Certains pourraient considérer que c’est plus facile de s’injecter un médicament une fois par semaine, en s’imaginant que suivre un programme comme celui de Virta nécessite beaucoup plus d’efforts. J’aimerais vous entendre sur ce genre d’argument.
Sami Inkinen :
Tout le monde peut dire ça. Je vous donne simplement deux statistiques. L’une porte sur l’observance de la prise des médicaments GLP-1. Et on peut se demander pourquoi. Après un an, de 35 % à 40 % des personnes traitées pour obésité continuent de prendre leurs médicaments GLP-1. Est-ce peu ou beaucoup? Ça me semble assez peu. Les patients de Virta sont deux fois plus susceptibles de poursuivre notre programme nutritionnel. On parle de 83 % après un an, selon notre essai évalué par les pairs et publié. Le pourcentage de Virta est un peu moins élevé dans le segment commercial en raison de la perte d’admissibilité. À la lumière de ces données, les patients sont deux fois plus susceptibles de respecter notre protocole nutritionnel la première année que de prendre un médicament. C’est un premier point de comparaison.
Deuxième point, en sondant nos patients et en se basant sur une enquête nationale auprès des Américains qui souffrent d’obésité, on apprend que la grande majorité éviterait de prendre un médicament à condition d’obtenir des résultats autrement. Oui, on entend souvent ça au pays, je ne sais pas d’où ça vient, mais c’est comme si les Américains préfèrent toujours prendre une pilule plutôt que de changer leurs habitudes. Il y a peut-être du vrai là-dedans, mais c’est presque comme si on l’acceptait sans vérifier la réalité. Je veux bien, mais si on donne des outils pour perdre du poids sans souffrir de la faim, les gens vont toujours préférer l’approche nutritionnelle. Si les patients doivent choisir entre se serrer la ceinture tout le temps, en comptant les calories et en redoutant l’inévitable échec, ou prendre un médicament pour gérer la faim et les fringales , oui, ils sont plus susceptibles de prendre le médicament. C’est mon point de vue.
Charles Rhyee :
Vous avez souligné que l’observance dans la prise des médicaments GLP-1 est de 30 % à 40 %. Les coûts l’expliquent certainement en partie. Qu’il s’agisse de l’accès à un régime d’assurance ou de frais remboursables. Dans une mise à jour que vous venez de publier pour le premier trimestre, vous notez des économies de 50 % sur les médicaments GLP-1 pour vos clients du classement Fortune 500. Qu’est-ce que ça représente exactement, et comment pouvez-vous offrir de telles économies aux employeurs?
Sami Inkinen :
Oui, c’était très intéressant. Et j’ajouterai que c’est encore tôt. On pourra revenir sur le sujet dans un an pour voir si les choses ont progressé ou empiré. Oui, on est parvenus à réduire de moitié les dépenses pour les médicaments GLP-1. Ce n’est pas rien, c’est même majeur. Tout ça en maintenant ou en améliorant la perte de poids. C’est extrêmement important. On n’y est pas parvenus avec l’approche traditionnelle américaine de gestion des coûts de santé axée sur l’utilisation, qui est source d’obstacles et de tensions pour les membres et les employés. La façon la plus simple de réduire les coûts, c’est de retirer un produit de la liste de médicaments assurés en disant qu’il est trop cher. Voilà comment fonctionnent, pour le meilleur ou pour le pire, les soins de santé aux États-Unis. Si un médicament est trop cher, on le retire de la liste. Le problème est réglé sans verser un sou. Ce n’est pas notre approche.
On ne veut pas non plus proposer un moyen terme compliqué, comme d’autoriser d’abord les traitements moins coûteux. Avant d’obtenir la couverture d’un médicament GLP-1, c’est un peu comme s’il fallait courir un marathon à reculons. Cette approche multiplie les obstacles; c’est très, très difficile d’obtenir la couverture. Dans notre cas, on donne le choix au membre. On lui propose d’abord notre programme nutritionnel en montrant nos résultats. On lui dit que, grâce à cette approche, il est susceptible d’atteindre une perte de poids semblable à celle des médicaments. On l’invite à l’essayer d’abord. Et la majorité des membres qui pensaient au départ prendre le médicament essaient notre programme. Ça nous permet de réduire au minimum les frictions avec les membres ou les employés, qui demeurent couverts par leur régime d’assurance-maladie. En choisissant le traitement nutritionnel, ils perdent autant de poids qu’en prenant un médicament GLP-1.
Oui, un certain pourcentage demeure réticent à changer leurs habitudes nutritionnelles. Ils sont emballés par ces médicaments dont ils ont entendu parler par un ami ou un collègue, à la télévision, sur Instagram ou ailleurs. C’est ce qu’ils veulent vraiment. On précise alors, dans ce cas, que le médicament est couvert par leur régime, mais qu’on leur fournira en plus du soutien pour changer leur alimentation pendant la prise du médicament. Les médicaments GLP-1 réduisent assurément l’appétit, mais ne changent rien à ce que l’on mange. Si vous cédez encore à la malbouffe, qui n’apaise pas les fringales et la faim, il faut y voir. On essaie de changer ce que vous mangez en parallèle. C’est comme ça qu’on a diminué de 50 % les dépenses des médicaments GLP-1, tout en maintenant ou en améliorant la perte de poids. Cette combinaison magique réduit au minimum les frictions, améliore ou maintient les résultats et abaisse les coûts.
Charles Rhyee :
Donc, même pour les patients qui décident de prendre des médicaments GLP-1, vous leur offrez le soutien nécessaire en leur enseignant à mieux manger. De toute évidence, pour les patients qui prennent ces médicaments, l’idée de ne jamais pouvoir les abandonner n’est sans doute pas très attirante. L’idée c’est d’atteindre ses objectifs, puis de réduire progressivement les médicaments. Mais il faut avoir intégré les bons comportements. Même les données des essais cliniques pour Ozempic ou Wegovy, si je me souviens bien, ont montré après six mois que bien des patients avaient repris en bonne partie le poids perdu, sans doute parce qu’ils n’avaient pas modifié leurs habitudes alimentaires, leur comportement.
Tout le monde reconnaît que la demande pour ces médicaments augmente. On s’intéresse peut-être davantage à la gestion comportementale, et plus d’employeurs cherchent à en profiter. On dirait que c’est ce que vous offrez. Est-ce le nerf de la guerre, la voie à suivre? Des entreprises, comme Cigna avec EncircleRx et d’autres programmes, commencent à associer traitements médicaux et soutien aux patients. Pensez-vous que c’est la façon la plus efficace d’obtenir des résultats à long terme et de conserver les avantages d’utiliser ces médicaments?
Sami Inkinen :
Oui et non. Non, parce qu’il faut repérer le signal malgré le bruit et distinguer (bip) le faux du vrai. Je ne vais pas mettre de gants blancs ni parler d’une entreprise en particulier, mais, à voir le coût des médicaments GLP-1, le volume et l’argent dépensé, c’est comme la ruée vers l’or. Chacun propose un service complémentaire pour ces médicaments. Mais, ça n’ajoute aucune valeur, à moins que ce volet soit aussi autonome. Tout acheteur ou décideur qui se fait proposer une application avec ces médicaments devrait demander si cette application et le programme de soutien nutritionnel offert procurent des résultats crédibles sans le médicament. Si ce n’est pas le cas, il s’agit très probablement de machins inutiles. Pourquoi est-ce que je dis ça?
Parce que ces médicaments sont efficaces. Ils réduisent la quantité de nourriture ingérée, ce qui fait perdre du poids. Alors, ce genre de service complémentaire n’apporte pas grand-chose. J’ai l’impression de reprendre mes propres arguments, mais, en plus du service complémentaire, on propose un programme, des coachs, des fournisseurs et un soutien intensif qui assurent une perte de poids comparable à celle des médicaments GLP-1 par une approche nutritionnelle. Deuxièmement, et c’est aussi évalué par les pairs et publié, on a aussi prouvé la capacité de maintenir la perte de poids au moins un an après l’abandon des médicaments GLP-1. J’insiste : la capacité de maintenir la perte de poids par l’approche nutritionnelle un an après l’abandon des médicaments GLP-1. C’est essentiel, parce que, comme vous l’avez souligné, tous les essais publiés par les sociétés pharmaceutiques confirment une courbe en V à l’abandon des médicaments GLP-1. Les patients reprennent presque instantanément leur poids sous l’effet yo-yo. C’est cliniquement mauvais, ça ne donne pas les résultats de santé attendus.
Et si vous êtes un promoteur de régime ou un employeur, vous venez peut-être de payer en pure perte 3 000 $ après trois mois ou 6 000 $ après six mois pour jouer au yo-yo. Ce qu’il faut retenir, premièrement, c’est de prendre ces médicaments de façon responsable. Deuxièmement, il faut obtenir du soutien et envisager une approche nutritionnelle appropriée. Et, troisièmement, il faut prévoir une stratégie de sevrage. Penser qu’une application constitue un service complémentaire relève du mirage. Il y a beaucoup d’entreprises et d’applications en lice. Je comprends, chacun veut profiter de la ruée vers l’or. Tout le monde propose un service complémentaire et a toutes sortes de prétentions. Mais il faut examiner les preuves. Dans le domaine de la santé numérique, c’est un peu difficile, car aucune approbation de la FDA n’est requise. À peu près n’importe qui peut prétendre obtenir des résultats. Mais, le plus souvent, le compte n’y est pas.
Charles Rhyee :
Vous avez fait allusion à une ruée vers l’or. Beaucoup d’acteurs en télésanté proposent aussi des versions magistrales des médicaments GLP-1. Y a-t-il un rôle pour ces entreprises sur le marché? Quel est votre point de vue?
Sami Inkinen :
Vous parlez des entreprises de vente directe aux consommateurs, qui offrent un accès facile aux médicaments GLP-1. Il y a deux façons de voir les choses. L’un des arguments veut qu’il y ait des frictions sur le marché. L’entreprise a pour but de les réduire et de faciliter l’accès aux médicaments. On a vu ce qui s’est passé lorsque les sociétés se sont mises de la partie avec Adderall, les comprimés pour la dysfonction érectile, etc. On peut facilement présenter des arguments pour ou contre. Le risque vient de la petite entreprise de commerce électronique qui fonde son modèle économique sur le volume d’ordonnances. Elle cherche à vendre le plus de comprimés et d’injections possible et à réduire ses coûts au minimum pour maximiser ses profits. Cet incitatif économique m’apparaît très, très dangereux. Je dis toujours que l’argent parle; ça dicte ce que l’entreprise va faire. Soit dit en passant, chez Virta, on est payés que pour les membres traités, et seulement si on obtient des résultats cliniques.
Sans quoi, on ne reçoit rien. La seule façon pour nous de gagner notre pain, c’est de traiter avec succès le diabète de type 2 ou l’obésité. Je vois ça comme un risque pour les entreprises de vente directe aux consommateurs. Elles tâchent de maximiser les ordonnances et de réduire les coûts au minimum. Et leurs fournisseurs n’établissent pas une relation longitudinale de trois ans avec les patients comme on le fait. Elles n’emploient pas non plus de salariés à temps plein qui paient des impôts. Le plus souvent, on a affaire à des médecins indépendants qui cliquent sur une souris et approuvent les ordonnances en quelques secondes.
Ça me semble très risqué. Je comprends que ça élimine les frictions et que ça facilite l’accès. Mais, c’est le problème que je vois. Le promoteur ou l’employeur dont le régime couvre ne serait-ce qu’une partie de ces médicaments est en droit de se demander si c’est simplement une façon d’accroître l’utilisation. Est-ce que la perte de poids se limite à quelques mois sans aucune surveillance des effets secondaires potentiels avant que le patient recommence à engraisser? Quand je parle aux employeurs, personne n’aime ces pourvoyeurs de pilules. Personne.
Charles Rhyee :
Encore quelques questions... Une nouvelle génération plus efficace de comprimés à prise orale devrait être commercialisée dans les prochaines années. Selon vous, quelle sera la réaction sur le marché?
Sami Inkinen :
Je n’investis pas en biotechnologie; ce n’est pas mon domaine. Mais je dirai deux ou trois choses. D’abord, plus il y a de concurrence, mieux l’innovation se porte, ce qui devrait faire baisser les prix unitaires. Je compte là-dessus, mais ça reste à voir. L’insuline existe depuis cent ans. Plusieurs fabricants en produisent, mais les prix ne cessent d’augmenter. Il n’y a pas de garantie. Voilà pour le premier point. Deuxièmement, les médicaments à prise orale sont, pour la plupart des patients, l’option plus attrayante si l’efficacité est aussi bonne et les effets secondaires aussi faibles. Pour la plupart des patients, c’est plus facile. Ça risque d’augmenter l’utilisation, selon moi, et d’autres médicaments à prise orale vont certainement arriver sur le marché. Ça ne fait pas de doute. Je pense que la question porte davantage sur les résultats, la tolérance et les effets secondaires de l’ingestion intestinale; le médicament doit être métabolisé. Le temps le dira, mais je crois que cette innovation est prometteuse.
J’espère sincèrement, pour mon entreprise Virta, mais aussi pour l’humanité, les patients et les contribuables, qu’on n’oubliera pas le fait que, malgré les nouveaux médicaments et toute l’innovation, le diabète de type 2 continue d’augmenter, tout comme les coûts. Il faut s’attaquer aux causes profondes du dysfonctionnement métabolique, en commençant par la nutrition. Peu importe l’essor de l’innovation, comme on le voit avec le diabète de type 2 aux États-Unis depuis 30 ou 40 ans, si on ne s’attaque pas à l’alimentation, on ne fait que soulager les symptômes. On doit résoudre le dysfonctionnement métabolique causé par la malnutrition en même temps qu’on poursuit l’innovation pharmaceutique. Il y a peut-être un peu trop d’enthousiasme à l’égard des nouveaux médicaments par rapport à la réalité.
Charles Rhyee :
Tout le monde est attiré par la nouveauté, même si l’ancienne version convient très bien. Parfois, les gens préfèrent se tourner vers l’avenir au lieu de s’en tenir à ce qui fonctionne. Sami, une dernière question... D’ici deux à cinq ans, à quoi va ressembler le marché, selon vous, et quels sont vos espoirs?
Sami Inkinen :
Je pense à deux choses. Dans quatre ou cinq ans, on aura trois principaux outils pour lutter contre l’obésité. Premièrement, je ne pense pas que [inaudible] va disparaître, mais le volume va probablement diminuer. Ça représente probablement 0,1 % sur le marché, et peut-être qu’il y a de la place pour ça. Deuxièmement, des médicaments GLP-1 plus puissants et causant peut-être même moins d’effets secondaires vont faire leur apparition. Et, troisièmement, la nutrition demeure le traitement de base; il faut espérer qu’elle retienne l’attention encore davantage. Je dirais que la chirurgie bariatrique et certains médicaments, très probablement différents types de GLP-1, composent l’essentiel de l’arsenal thérapeutique contre l’obésité. Les changements nutritionnels dans le mode de vie deviennent ensuite l’outil de base. Deuxièmement, sans vouloir faire de la politique, je voudrais souligner que le mouvement « Make America Healthier Again » (MAHA) manifeste précisément la volonté d’éradiquer la plupart des maladies chroniques aux États-Unis.
Je pense en particulier au diabète et à l’obésité, dont la cause profonde peut être réglée d’abord par l’approche nutritionnelle. Au-delà de ce qu’on peut penser du mouvement MAHA, cette thèse me paraît miser juste. Dans les quatre prochaines années, il va falloir insister davantage sur le fait qu’il est possible d’inverser certaines maladies chroniques, en particulier le diabète de type 2, grâce à la nutrition. Plus l’enjeu retiendra l’attention, mieux ce sera. J’ai modérément espoir que des entreprises comme Virta et toutes sortes d’approches nutritionnelles efficaces fondées sur les données probantes obtiennent des résultats positifs.
Charles Rhyee :
Il faut battre le fer pendant qu’il est chaud, compte tenu de toute l’attention que certains accordent à cette question. Très bien. Sami, comme toujours, ç’a été un plaisir de discuter avec vous. Merci de votre présence. J’espère que les auditeurs auront noté certaines réflexions. De toute évidence, l’enjeu va retenir l’attention générale dans les prochaines années. Voilà ma conclusion. Merci à tous nos auditeurs qui ont suivi cet épisode. Surtout, ne ratez pas le prochain. Merci beaucoup.
Sami Inkinen :
Merci, Charles. C’était très agréable.
Locuteur 1 :
Merci d’avoir été des nôtres. Ne manquez pas le prochain épisode du balado Insights de TD Cowen.
Les opinions qui y sont exprimées représentent les opinions personnelles du rédacteur et ne reflètent pas nécessairement les opinions de Valeurs Mobilières TD ou des membres de son groupe.
Le présent contenu vise à donner des commentaires sur le marché des produits dont il est question dans le présent document.
Le présent document ne donne pas de conseils : Les renseignements qu’il contient sont fournis à titre indicatif seulement et ne visent pas à donner des conseils ou des recommandations de nature professionnelle, de placement ou autres ni à établir une relation fiduciaire. Ni TD Securities (USA) LLC (« Valeurs Mobilières TD aux États-Unis ») ni ses sociétés affiliées (collectivement, la « TD ») ne font de déclaration ou ne donnent de garantie, expresse ou implicite, concernant l’exactitude, la fiabilité, l’exhaustivité, la pertinence ou la suffisance à toute fin des renseignements contenus dans le présent document. Certains renseignements peuvent avoir été fournis par des sources tierces et, même s’ils sont jugés fiables, n’ont pas été vérifiés de façon indépendante par la TD; ni leur exactitude ni leur exhaustivité ne peut être garantie. Vous ne devez pas prendre de décision de placement en vous fiant à ce document, qui ne vise qu’à fournir de brefs commentaires sur les sujets abordés, et qui est fondé sur des renseignements susceptibles de changer sans préavis.
Le présent document n’est pas une étude sur des valeurs mobilières ou des produits dérivés : Il n’a pas été produit, revu ou approuvé par les services de recherche sur les valeurs mobilières et les produits dérivés de la TD. L’opinion de l’auteur peut différer de celle d’autres personnes à la TD, y compris des analystes de recherche sur les valeurs mobilières et les produits dérivés de la TD.
Partialité : Les opinions exprimées dans le présent document peuvent ne pas être indépendantes des intérêts de la TD. La TD peut se livrer à des activités conflictuelles, y compris la négociation de capital avant ou après la publication du présent document, ou d’autres services portant sur des produits mentionnés dans le présent document, ou sur des produits financiers connexes. La TD peut avoir un intérêt financier dans les produits mentionnés dans le présent document, y compris, sans s’y limiter, un produit financier fondé sur de tels produits.
Le présent document n’est pas une offre ni une sollicitation : Rien n’y constitue ni ne devrait y être interprété comme constituant une offre, sollicitation ou invitation à acheter ou à vendre un produit ou un produit financier fondé sur un tel produit, et il n’est pas destiné à être distribué dans un territoire où une telle distribution serait contraire à la loi.
Risque de perte. Les opérations sur les produits et les instruments financiers fondés sur des produits comportent un risque de perte et sont soumis aux risques de fluctuation des prix. Vous devez évaluer les avantages potentiels par rapport aux risques. Le rendement passé n’est pas un indicateur du rendement futur, et le contenu de ce document ne vise pas à prévoir ni à prédire des événements futurs.

Directeur général, Soins de santé – Analyste de recherche en technologies de soins de santé, TD Cowen
Charles Rhyee
Directeur général, Soins de santé – Analyste de recherche en technologies de soins de santé, TD Cowen
Charles Rhyee
Directeur général, Soins de santé – Analyste de recherche en technologies de soins de santé, TD Cowen
Charles Rhyee est directeur général et analyste de recherche principal en distribution et technologies de soins de santé. M. Rhyee a été reconnu dans les sondages menés par le Wall Street Journal et le Financial Times. En 2023, il s’est classé au troisième rang du sondage All-America dans le segment de la distribution et des technologies de soins de santé du magazine Institutional Investor et a été nommé Best Up & Coming Analyst en 2008 et en 2009.
Avant de se joindre à TD Cowen en février 2011, il a occupé le poste de directeur général de la distribution et des technologies de soins de santé pour Oppenheimer & Co. M. Rhyee a commencé sa carrière en recherche sur les actions à Salomon Smith Barney en 1999.
Il est titulaire d’un baccalauréat en économie de l’Université Columbia.